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Fr Notes Utiles / Krach du Jeu Vidéo de 1983
aka: The Great Video Game Crash Of 1983

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Quatre consoles. Quatre ordinateurs. Huit fois le même jeu. Oups.

"En cet après-midi de 1982, les parents, excédés, se disent qu'on ne les y reprendra plus."
Meeea, L'Antre du Mea

Au début des années 1980, l'industrie américaine du jeu vidéo entra dans sa seconde génération, et générait alors de l'argent à tour de bras. Les salles d'arcade poussaient comme des champignons, l'Atari 2600 dominait la compétition sur le marché des consoles de salon, et Pac Man régnait en maître sur les États-Unis.

Mais en 1983, quelque chose tourna horriblement mal. Des dizaines de constructeurs firent faillite. La production de nouveaux jeux se faisait de plus en plus lente. Le marché américain des consoles de jeu se tarit pendant deux années entières ; et lorsqu'il revint, il était dominé par les entreprises japonaises, tandis que les vieilles entreprises américaine tentaient désespéramment de rattraper leur retard.

Que s'est-il passé ? Eh bien, l'histoire du Krach du Jeu Vidéo de 1983 commence avec la chute d'Atari, une entreprise à jamais liée au Krach :

  • Atari refusait de créditer ou de verser des droits aux concepteurs pour leur travail. Cela mena à de nombreuses dissidences, poussant un grand nombre de programmeurs à fonder leur propres entreprises pour créer des jeux sur la 2600 (celle ayant eu le plus de succès étant Activision). Atari perdit les actions en justices visant à empêcher ces entreprises d'utiliser son format de cartouche, permettant à la plupart des créateurs de concurrencer directement les efforts d'Atari.
  • La stratégie commerciale d'Atari, vendre les consoles à un prix aussi bas que possible en comptant sur les ventes de jeux pour faire des bénéfices, n'a fait qu'empirer la situation. La stratégie fonctionnait tant qu'Atari avait le monopole sur Space Invaders et Asteroids, mais lorsque des entreprises concurrentes commencèrent à produire des version améliorées et/ou moins chères, les bénéfices d'Atari chutèrent.
  • L'entreprise produisit un certain nombre de jeux sur-médiatisés mais de piètre qualité, notamment le portage de Pac Man et l'adaptation du film E.T. L'Extra-Terrestre sur l'Atari 2600. Ces deux jeux, bâclés afin de sortir pour les fêtes, ont rapidement acquis la réputation d'être deux des pires jeux jamais créés. Atari a également produit en masse ces deux jeux (ainsi que beaucoup d'autres), dans l'espoir qu'ils fassent vendre des consoles. Bien que les ventes initiales aient été prospères, et aient même atteint des nombres records dans le cas de Pac-Man, la rumeur de leur mauvaise qualité s'est rapidement propagée, et le nombre de cartouches produites submergea complètement les premiers bénéfices de vente. Les magasins renvoyaient les jeux invendables, ou les reléguaient aux rayons des liquidations. La situation a si mal tourné que Atari dut enfouir l'équivalent de millions de dollars de cartouches, d'accessoires et de consoles invendus ou défectueux dans une décharge désaffectée d'Alamogordo, au Nouveau-Mexique.
  • Le 7 décembre 1982, l'industrie du jeu vidéo connut son "mardi noir" : pendant une réunion d'investisseur, Atari prévit une augmentation des bénéfices de 10 à 15%, bien en dessous des 50% attendus. Les actions de la Warner Communications (propriétaire d'Atari) accusèrent une chute de 33% le jour suivant, et un scandale mineur éclata lorsqu'il fut découvert que le président d'Atari avait vendu près de 5000 parts de marché de l'entreprise à peine une demi-heure avant la fameuse annonce.

Leur clientèle rongée par des technologie bon marché et leurs bénéfices consumés par une production bien trop optimiste, Atari avait subi près d'un demi-milliard de dollars de pertes à la fin de l'année 1983 (l'équivalent de plus d'un milliard aujourd'hui). Atari n'étaient cependant pas les seuls à faire face à des problèmes, car leurs concurrents vivaient également des moments difficiles :

  • Le marché saturé d'entreprises cherchant à tirer profit du succès d'Atari donnait trop de choix aux acheteurs ; aucune console ne pouvaient donc sortir gagnant de cette situation, car très peu de personnes en achetaient plusieurs. Ce déluge de consoles incluait (entre autres) l'Astrocade, la Colecovision, la Coleco Gemini, la Home Arcade, l'Odyssey, la Videopac, l'Intellivision, la Vectrex, et la Fairchild Channel F System II. Beaucoup d'entre elles avaient des ludothèques quasi-identiques, en partie à cause du fait qu'Atari, Coleco et Mattel sortaient chacun des jeux pour les consoles des autres. L'illustration de cette page montre ainsi le problème auquel étaient confrontés les consommateurs lorsqu'ils choisissaient quelle console acquérir. De nombreux acheteurs attendirent de voir quelle machine dominerait le marché ; et lorsque tout le monde se rendit compte qu'aucune n'y parviendrait, les entreprises étaient déjà en train de faire faillite.
  • Un problème similaire eu lieu concernant les logiciels. Les sociétés pouvaient produire des jeux pour leurs machines pour peu de frais ; partant du principe que n'importe quel jeu se vendrait peu importe sa qualité, des titres médiocres développés par des sociétés créées à la va-vite envahirent le marché. Des entreprises hors du domaine du jeu vidéo produisirent des jeux servant de publicités (mal) déguisées, telles que Pepsi Invaders ou Kool-Aid Man. Ces sociétés furent les premières à souffrir des effets du Krach.
  • Alors que les fabricants et développeurs faisaient faillite, les revendeurs durent faire face à leurs propres problèmes : des entrepôts remplis de produits invendus qu'ils ne pouvaient retourner. Les magasins vendirent les produits pour des prix misérables afin de rattraper tant bien que mal les dégâts du Krach, et le marché des nouveaux jeux vendus au prix fort fut rongé par des tonnes de jeux médiocres et bon marché.
  • Les acheteurs n'avaient aucun moyen de discerner les bons jeux des mauvais. Internet n'était encore qu'un projet militaire et académique, et les magazines de jeux vidéo étaient rares, et la plupart des gens ne pouvaient donc se fier qu'aux images et au texte présent sur la boîte pour savoir à quoi s'attendre. Puisque celles-ci mentaient souvent afin de pousser les gens à acheter le jeu, les acheteurs apprirent rapidement la prudence à leurs dépens. Plusieurs magasins disposaient de stations de démonstration pour essayer les jeux, mais cela n'a pas vraiment aidé.
  • Le marché des ordinateurs commença à décoller en Amérique. Les ludothèques des PC satisfaisaient les joueurs, mais leurs logiciels éducatifs et bureautiques leur donnaient l'avantage. Certains d'entre eux, comme le Commodore 64, finirent par être vendus à des prix concurrençant les consoles de jeu. Commodore et tous les autre fabricants ciblèrent les mères inquiètes que leurs enfants ne puissent pas entrer à l'université ou trouver du travail s'ils n'étaient pas capables d'utiliser un ordinateur.
  • Un tollé médiatique affirmant que les jeux vidéo n'étaient qu'une mode passagère utilisa les faillites des entreprises comme preuve de l'inéluctable disparition de l'industrie.

Le Krach fut une véritable euthanasie du marché des consoles de jeu en Amérique : les ventes de jeu vidéo chutèrent de 3 milliards de dollars en 1982 (7,2 milliards aujourd'hui) à 100 millions de dollars en 1985 (216 millions aujourd'hui), ce qui causa la faillite de la grande majorité des entreprises de jeu vidéo.

Lorsque le marché reprit de l'importance en 1985, cela fut en grande partie dû au succès de la NES de Nintendo, et le Japon d'où la console était originaire avait détrôné l'Amérique en tant que leader de l'industrie du jeu vidéo, ce qui signifie que le Krach n'aurait jamais pu causer la mort du jeu vidéo en tant que média (on peut comparer le Krach version condensée du genre de décisions financières ayant mené aux crises économiques de 1929 et 2008).

Le marché des consoles de salon soufra grandement de la mort temporaire des consoles dédiées, mais le nombre croissant d'ordinateurs (en particulier le Commodore 64) procura un remplacement viable pourles quelques entreprises survivantes contunant à produire des jeux. Bien que la scène américaine de l'arcade ait commencé à décliner, les bornes d'arcades étaient encore proches du pic de leur popularité. Beaucoup de classiques de l'arcade comme Paperboy, Punch Out, Space Ace, Karate Champ et Gauntlet virent le jour durant cette période ; et la plupart furent portés sur console (avec plus ou moins de succès) après la renaissance du marché.

En dehors de l'Amérique du Nord, cependant, le Krach a eu peu d'impact. En Europe, les microordinateurs 8-bit dominaient déjà le marché (notamment le ZX Spectrum et le Commodore 64). Un nombre exorbitant de programmeurs solitaires codaient et sortaient des jeux au format cassette, bien moins coûteux, ce qui aida ces machines à prospérer et à devenir le pilier porteur de l'industrie du jeu vidéo en Europe pour la décennie entière. Ces "programmeurs de garage" furent qualifiés de noms allant de "héros culte" (Jeff Minter, Matthew Smith, etc.) à "légende" (Bell and Braben, the Oliver Twins, etc.) par leurs fans ; ce qui n'empêcha pas un certain nombre de développeurs talentueux de prendre suffisamment de décisions stupides pour transformer une réussite assurée en échec. Mais malgré ces faux pas, l'industrie du jeu vidéo tint bon en Europe (néanmoins, un krach similaire eut lieu à cause de la saturation du marché des ordinateurs de bureau au Royaume-Uni en 1984, causant la disparition de machines peu populaires telles que le Dragon 32 et le Jupiter Ace et la reprise de Sinclair par Amstrad et d'Acorn par Olivetti).

Le Krach eut également peu d'impact sur le marché japonais. Bien qu'un marché massif des bornes d'arcades soit né des salles de Pachinko et des tables de Mahjong, le Japon avait initialement fait l'impasse sur les consoles de salon ; les importations américaines étaient, au mieux, des curiosités. Les prix grandement réduits auxquels le Japon forçait la vente de produits informatiques après le Krach offrirent une opportunité parfaite pour développer le marché domestique ; et la sortie de la Famicom et du MSX en 1983 aida également. Les deux systèmes dominèrent le marché japonais pour le reste de la décennie, bien que le second fut par la suite dépassé par le marché concurrent grandissant du PC (au début de 1983, Atari avait commencé à négocier les droits de distribution de la Famicom en occident ; le Krach mit fin à ces plans, mais imaginez ce qu'il aurait pu en résulter...).

Nintendo exporta la Famicom deux ans plus tard en tant que "Nintendo Entertainement System" et atteignit un quasi-monopole du fait de l'affaiblissement du marché américain. Le "Nintendo Seal of Quality" et l'impossibilité de produire des cartouches sans l'accord de Nintendo offrirent un certain degré de protection envers les logiciels de qualité médiocre qui gangrénaient Atari. Pour apaiser les craintes des revendeurs américains ayant subi le Krach, Nintendo conçut la NES avec une fente de lecture de cartouches frontale, à la manière d'un magnétoscope, et inclut avec la console deux périphériques, le Robotic Operating Buddy (R.O.B.) et le Zapper (respectivement un robot et un pistolet optique, qui ressemblaient beaucoup pus à des jouets traditionnels). Le premier ne fonctionnait qu'avec deux jeux, et le second ne fit pas beaucoup mieux à la longue.

Les magasins de jouets ne furent pas dupes, mais le succès auprès des marchés-tests ainsi qu'une excellente stratégie publicitaire offrit à la NES une place sur tous les étalages du pays. Nintendo disposait également du jeu idéal pour accompagner la NES pour ses débuts sur le sol américain en 1985 : un plombier italien ventripotent, connu pour avoir fait face à un gorille balourd, s'aventurant au sein d'un pays envahi de tortues et de champignons sur pattes pour secourir une princesse des griffes d'une tortue-dragon maléfique.

L'idée fut suffisamment dingue pour fonctionner, et inaugura une nouvelle ère du jeu vidéo.


Alternative Title(s): The Great Video Game Crash Of 1983

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